Japon, 1965. Une gigantesque entité, au design encore jamais vu, apparaît sur l’archipel. Ses trois yeux insondables semblent regarder au loin. Cette étrange créature faite de métal et de plastique souhaite anéantir les monuments ancestraux présents sur son chemin, tel le format 8mm.
Première caméra de Fujifilm utilisant le format-maison Single 8, la P1 se veut également très simple d’utilisation. Elle possède un seul bouton (pour lancer la prise de vue) et l'utilisateur est donc délesté de toute technique. La P1 ne possède pas de zoom ni de réglage de mise au point. Avec ce modèle très simple et très peu cher, Fuji et son format Single 8 vont conquérir le monde.
Mais voici qu'apparaît dans le lointain, sur le continent américain, une autre créature...
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Le combat des deux géants promet d'être épique. Deux monstres du cinéma s'affrontent : Mecha-Fujica contre Kaiju-Kodak.
En 1965, Kodak et Fujifilm lancent respectivement le Super 8 et le Single 8, successeurs du format 8mm.
Le terme "S8" englobe à la fois le Single 8 et le Super 8 dans les explications ci-dessous.
Le S8 utilise la même largeur de film que le 8mm mais possède des perforations plus étroites. Ainsi l’image en S8 occupe 72% de la surface disponible contre 55% en 8mm : l’image est donc plus détaillée en Super 8. Autre différence majeure, le S8 se présente sous forme de chargeurs très facile à installer, contrairement aux bobinots ouverts du format 8mm. (1)
Qu'est-ce qui différencie le Single 8 et le Super 8 ?
Le Single 8, qui est la version japonaise du Super 8, se présente lui aussi en chargeurs de 15 mètres, mais contrairement au Super 8, le presseur, c’est-à-dire la plaque qui presse le film sur la fenêtre de la caméra, ne se trouve pas dans la cassette. Elle fait partie de la caméra elle-même. Le Single 8 possède des perforations identiques à celle du Super 8 mais utilise un support de film en polyester extrêmement mince, pratiquement indéchirable. Les avantages spécifiques du Single 8, dont la surface d’image est identique à celle sur Super 8, résident surtout dans les possibilités de trucages plus nombreuses qu’il autorise, grâce au rebobinage du film, c’est-à-dire la marche arrière permettant de réaliser des fondus enchaînés. D’aucuns prétendent aussi que, grâce à son presseur indépendant du chargeur, il donne des images d’une plus grande netteté. (2)
En résumé, le Single 8 et le Super 8 sont deux chargeurs de formes différentes contenant le même format de film.
Le Super 8 aura largement plus de succès bien qu'aucun avantage technique majeur ne pèse en sa faveur.
C'est ainsi que Mecha-Fujica sombra lentement dans les profondeurs du Pacifique, vaincu par Kaiju-Kodak le nouveau monstre du cinéma.
Dans le prochain épisode, King-Sony (le colosse), JVC- Drah (le monstre à trois lettres) et Philips-Grundig (l'entité V-2000) viendront défier Kaiju-Kodak.
Qui sortira vainqueur ? Mystère...
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Pierre Bouchut
(1) "Le cinéma et ses techniques" Editions techniques Européennes
(2) "250 réponses à vos questions Super 8", Edition Paul Montel
Fabriquée entre 1965 et 1977
Single 8 muet
Cadence : 18 i/s
0,5 kg à vide
Alimentée par quatre piles AA + pile bouton pour la cellule
Posemètre-couplé intégré
Visée directe
Moins de 100€
Utilisateur & déposant : Denis Malbos
Cette caméra produite par le célèbre fabricant de posemètres Sekonic est totalement dans la veine du nouveau type de caméra né avec le format Super 8 : les caméras automatiques possédant très peu de fonctions.
Au cœur de ces nouvelles caméras simplissimes se trouve notamment la démocratisation des cellules mesurant la luminosité et réglant l’ouverture du diaphragme afin que le film reçoive la bonne quantité de lumière. Sekonic étant spécialisé dans la fabrication de ces cellules au sélénium, on peut légitimement attendre de cette Copal Eye 300 qu’elle mesure et gère parfaitement l’entrée de lumière. Cette technologie embarquée de mesure de lumière couplée au réglage de diaphragme existait déjà auparavant en 8mm et 9,5mm mais était réservée aux modèles perfectionnés voire haut de gamme.
Cette caméra assez lourde se distingue également par son design étonnant, notamment au niveau du placement de sa poignée non articulée. Après quelques secondes d’étonnement et de test, cette poignée s’avère assez bien pensée, pour les gauchers et les droitiers, si l’on omet l’angle assez peu naturel que doit adopter notre poignet.
A l’époque, on distingue deux types de cellules : celles fonctionnant au sélénium et celles fonctionnant au sulfure de Cadmium. Sans entrer dans les détails, les cellules au sélénium n’ont pas besoin d’être alimentées électriquement car elles produisent le courant nécessaire pour faire bouger l’aiguille d’un posemètre. Les cellules au sulfure de Cadmium ont besoin d’être alimentées (généralement par pile bouton 1,34 V) mais sont bien plus sensibles que leurs équivalents au sélénium.
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Pierre Bouchut
Fabriquée durant les années 1970
Super 8 muet
Cadence : 18 i/s
1,1 kg à vide
Alimentée par quatre piles AA
Mise au point manuelle
Zoom par commande électrique uniquement
Posemètre-couplé intégré
Visée réflex
Utilisateur & déposant : François Cheneval
François Cheneval, électro-technicien de profession, est passionné d’appareils anciens. Il collectionne notamment les radios TSF et a constitué chez lui un étonnant petit musée. En plus de ces projecteurs et caméras, M.Cheneval nous a confié les superbes films de son grand-père Adrien Bonnefoy, tournés entre la fin des années 20 et le début des années 30 à Fillinges >>>
Le Super 8 est le symbole de la démocratisation du cinéma amateur à l’échelle planétaire. Cette démocratisation s’est faite, entre autres, en confiant une bonne partie de la technique de prise vue à l'électronique embarquée dans les caméras. La Movexoom S, comme tant d’autres caméras Super 8, fait appel à l’électricité pour nous délester de toute réflexion ou effort technique lors de la prise de vue. Il est parfois possible de gérer manuellement certains paramètres, comme par exemple l’exposition sur la Movexoom grâce à l’une des deux molettes présentes sur cette dernière.
La fée électricité étant de tous les combats, la lampe-torche Ciné-Agfalux est là pour prêter main forte en élevant la luminosité ambiante lors des prises de vues d’intérieur. Le preneur de vue attentionné aura bien évidemment prévenu l’assemblée avant d’allumer sa torche d’une puissance de 650 W.
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Pierre Bouchut
Fabriquée en 1967
Super 8 muet
Cadences : 12, 18, 24 i/s + image par image
1,20 kg à vide (1,7 kg avec lampe)
Zoom et mise au point manuels
Diaphragme automatique ou manuel
Fixation pour lampe-torche
Visée réflex
Déposant : M. Lacroix
Avant tout, mettons de côté l’audio sur piste optique, car ce dernier appartient au monde professionnel et non pas amateur.
Tous les formats de film peuvent accueillir de l’audio sous forme d’une fine piste magnétique occupant l'espace libre entre le photogramme et le bord du film. Le Super 8 apporte cependant une innovation majeure pour les cinéastes amateurs : la prise de son directe et synchrone.
Depuis 1974, que ce soit en Single 8 ou en Super 8, on peut se procurer des chargeurs de films vierges déjà pistés. Si vous êtes l’heureux possesseur d’une caméra Super 8 de dernière génération comme la S 2035 XL de chez Bauer, vous n’avez plus qu’à insérer ces nouveaux chargeurs et à brancher votre microphone afin de joindre le son à l’image, sans aucun effort. Les médisants diront que vous allez joindre un "inaudible brouhaha saturé" à l’image, et soyons honnêtes, ils n’ont pas tout à fait tort...
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Ci-contre, le détail d’un film Super 8 avec l’emplacement de la piste magnétique (3) et de la piste de compensation (4) servant à équilibrer l’épaisseur du film (et parfois également utilisée pour enregistrer du son).
Il ne faut pas oublier que la prise de vue sur film est par défaut muette. Si le cinéaste souhaite capturer le son de ce qu’il filme, il doit se munir d’un magnétophone en plus de sa caméra. Ensuite, lors de la projection, il doit synchroniser le son et l’image manuellement (un repère à l’image indiquant lorsqu’il faut lancer la lecture audio) ou à l’aide d’un synchroniseur (lien mécanique ou électrique entre le magnétophone et le projecteur). L’amateur éclairé peut, une fois son montage image effectué, faire poser ou poser lui-même une piste magnétique qu’il va s’empresser d’enregistrer avec ou sans mixage élaboré (cf. le projecteur Super 8 Bauer T520 Duoplay).
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Pierre Bouchut
Fabriquée en 1979
Super 8 muet et sonore
Cadences : 18 et 24i/s + image par image
1,35 kg à vide
Alimentée par six piles AA (autonomie théorique : 10 films)
Entrée microphone, sortie casque, entrée pour commande déportée
Fonction Contre-jour
Zoom manuel et par commande électrique
Exposition automatique et manuelle
Mise au point manuelle
Visée réflex
Parmi la foule d'aspects nouveaux qu’a apporté le Super 8, le plastique et la piètre qualité de fabrication sont deux choses dont on se serait bien passé. L’esthète, amoureux des matériaux nobles et des objets bien pensés que je suis, a failli à maintes reprises sombrer dans une profonde dépression mêlée de nostalgie en voyant que plus les caméras et projecteurs étaient récents, plus ils étaient en ‘toc’. Heureusement que la Nizo 801 est arrivée pour me sauver d’une plongée sans retour dans les eaux troubles et visqueuses du “C’était mieux avant”.
Cette caméra c’est tout d’abord un poids à vide conséquent (1,4 kg), notamment dû à sa belle optique. Une fois l’objet appréhendé et sa prise en main maîtrisée, on ne peut s’empêcher de poser les doigts sur les bagues de son optique, sans pouvoir réprimer l’arrivée d’un sourire sur notre visage. Le glissement ferme et doux de ses bagues est un poème pouvant redonner confiance et espoir aux plus blasés d’entre nous. Une fois que s’est envolée la timidité des débuts, on touche l’aluminium de son corps, on tourne ses boutons et on appuie ses poussoirs. Tout est ferme et bien fini, nulle trace d'un jeu mécanique malvenu dans la Nizo 801.
Après de longues minutes en apesanteur, le cœur de l’esthète se trouve réconforté et réchauffé. Il pourra affronter sans crainte les prétendues “ouvertures faciles” mal fichues des boîtes de biscuits ou les tableaux de bord automobiles au design cauchemardesque. Et si un jour, l’esthète rechute dans les méandres du médiocre, il pourra toujours repenser à la Nizo 801 et à ses caractéristiques fabuleuses.
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Pierre Bouchut
Fabriquée entre 1975 et 1982
Super 8 muet
Cadences : 18, 24 et 54 i/s + image par image + variable entre 6 images/seconde et 1 image/minute
1,4 kg à vide
Alimentée par six piles AA + piles bouton pour la cellule (alimentation externe en option)
Fondu en entrée et en sortie, fondu enchaîné
Synchro pour flash, synchro matériel audio (impulsions 1 kHz)
Connectiques mécanique et électrique pour commandes déportées
Mise au point automatique et manuelle
Zoom manuel et piloté électriquement
Exposition manuelle et automatique (+ exposition longue durée manuelle)
Visée réflex
Utilisateur & déposant : Michel Gleyze